La confluence Véragne – Buëch à 70 ans d’écart
L’évolution du risque en bord de rivière au fil du temps
Voici l’épisode 3 de notre série « voyage dans le temps et le paysage ». Cette fois-ci nous sommes à Laragne, sur les contreforts de la montagne de Chabre et nous regardons la confluence entre le torrent de Véragne et le Buëch à 70 ans d’écart. Ces photos ont été publiées dans le Fil du Buëch « Spécial risques », distribués dans les boîtes aux lettres du bassin versant en fin d’année 2021. Comme nous vous l’annoncions dans le Fil du Buëch, nous avons envie de connaitre votre analyse sur l’évolution de ce paysage, n’hésitez pas à nous la livrer (votre analyse, s’entend) dans les commentaires en fin d’article.
Le Buëch façonne les paysages de la vallée depuis plusieurs centaines de milliers d’années. Son lit a connu de nombreuses évolutions, dont les traces sont visibles sur les paysages. Certaines de ces évolutions sont dues à la dynamique naturelle du Buëch. D’autres résultent des interactions avec les activités humaines qui se sont développées sur ses rives. Entre préservation de ce patrimoine naturel intégré au réseau NATURA 2000 et protection des activités humaines, rendons-nous sur les rives du Buëch à Laragne pour mieux comprendre ces interactions complexes.
Les deux panoramas ci-dessus ont été photographiés depuis un même point de vue en amont du carrefour de la RD 330 et RD 942. Le point de vue ancien est issu des archives départementales des Hautes-Alpes. Il y est archivé sous la côte F 3413/21 (fond Abeil) mais n’est pas daté. Il a été photographié dans les années 1950. Le cliché actuel a été pris en fin d’hiver 2021, pour éviter que la végétation ne masque le lit du Buëch.
Deux cours d’eau structurent le paysage de Laragne : le Buëch et la Véragne. Entre ces deux clichés, nous pouvons observer l’important développement de la végétation dans le lit des rivières. De nos jours, la confluence entre les deux cours d’eau n’est plus discernable dans le paysage.
Pourtant, il y a près de 70 ans les deux rivières présentaient un aspect de large rivière avec plusieurs bras en eau caractéristiques des rivières en tresses.
Ces espaces jouent de multiples rôles tant d’un point de vue écologique que sur l’aspect de gestion des risques naturels.
En effet, ces cours d’eau en tresses sont considérés comme rares à l’échelle de l’Europe. De ce fait, certains d’entre eux ont été classés pour favoriser leur préservation. C’est le cas du Buëch. De par sa dynamique, les différents bras du cours d’eau et les forêts alluviales qui les entourent constituent un réservoir de biodiversité important. Certaines espèces rares y trouvent un refuge tel que l’Apron du Rhône, le Castor d’Europe ou la petite Massette. En classant ces espaces, le milieu de vie de ces espèces peut être préservé.
Ces espaces sont également importants pour jouer un rôle dans la préservation de la ville de Laragne, notamment pour permettre le ralentissement des crues. La réduction de la largeur du lit de la rivière peut donc entraîner des phénomènes de débordement plus rapides dans des secteurs qui se sont urbanisés et favoriser les érosions et les incisions. Les ponts, les berges, les digues peuvent en subir les conséquences.
Il est donc important de préserver une largeur suffisante aux rivières pour leur permettre de conserver un fonctionnement équilibré car c’est, d’une part, tout un écosystème particulier qui en dépend et d’autre part, une nécessité pour limiter l’exposition des enjeux humains aux risques naturels.
La comparaison des photos nous montre donc l’évolution de notre cohabitation avec les milieux naturels que sont les cours d’eau mais aussi les changements quant à l’occupation du territoire sur les dernières décennies. C’est pourquoi il est important que la gestion d’un territoire n’occulte pas les enjeux liés aux milieux naturels.
Nous vous le demandions dans le Fil du Buëch : dites-nous en commentaires en quoi ces deux paysages sont différents selon vous ? Voyez vous des changements dans les activités humaines, dans le tracé des routes ? Une synthèse de vos observations sera publiée le 15 Mars prochain sur notre site.
Et si certains d’entre vous ont de vieilles cartes postales, dîtes le nous ! Ces clichés nous intéressent !