Le SMIGIBA est bien connu pour les études conduites depuis sur le bassin versant. Mais le SMIGIBA c’est aussi des travaux d’entretien des cours d’eau conduits en régie ou via des entreprises recrutées sur marchés publics depuis plus d’une décennie. Au bénéfice des communes et des communautés de communes de la vallée. Retour sur la campagne de travaux 2022 avec Cyril Ruhl, technicien de rivière du SMIGIBA. Au menu : opérations de restauration des cours d’eau, évacuation d’un dépôt sauvage et autres retraits d’embâcles.
Le contexte : pourquoi restaurer le lit des cours d’eau ?
Chaque année depuis 2015, le SMIGIBA définit et conduit des travaux mécaniques de restauration des lits des torrents sur le bassin versant du Buëch. Ces travaux relèvent des compétences statutaires du SMIGIBA. Ils sont réalisés au bénéfice de l’intérêt général, dans le respect de la réglementation en vigueur sur les travaux en rivière. Ils sont inclus dans la déclaration d’intérêt général du SMIGIBA.
Ces travaux se déclinent en 2 ou 3 phases selon les secteurs :
1. essartement de la végétation,
2. scarification des bancs pour les décompacter,
3. à certains endroits, des chenaux de redynamisation sont réalisés pour optimiser la remobilisation des alluvions lors des futures crues.
L’objectif principal de ces opérations est de favoriser la remise en mouvement des bancs alluviaux – les bancs de graviers déposés dans le lit – lors des crues, afin de conserver le fonctionnement en tresses des cours d’eau du Buëch et de limiter certains risques.
C’est un fait reconnu par les riverains aussi bien que par les chercheurs : depuis plusieurs décennies, les cours d’eau alpins se végétalisent – ou se ferment, selon la terminologie consacrée. Ce développement de la végétation s’accompagne également d’un changement de style fluvial : sur le Buëch et ses affluents, les cours d’eau évoluent d’un lit en tresses vers un lit chenalisé. Ces différents phénomènes ne sont pas sans conséquences sur le fonctionnement des cours, en particulier en période de crues.

Les conséquences de la fermeture des lits des torrents sont multiples. Concernant les enjeux humains :
- l’incision – ou enfoncement – du lit augmente le risques de déstabiliser les ouvrages tels que les fondations des digues ou les piles de ponts (un pont s’est effondré sur le torrent de Chauranne lors des crues de 2019. Cet évènement est directement lié à l’enfoncement du lit du cours d’eau, du fait de la fermeture de la rivière.),
- l’accentuation des érosions de berges, très fréquentes sur le Buëch et ses affluents, causent la perte de terres agricoles, de chemins ruraux et peuvent causer des dommages aux routes,
- l’accroissement des risques hydrauliques lors des crues importantes du fait de l’arrachement et du transport d’un plus gros volume de bois, de la création d’embâcles, etc.,



Concernant les principaux enjeux écologiques, la fermeture du lit d’un cours d’eau conduit aux problèmes suivants :
- l’incision du lit génère l’apparition de la roche mère (le soubassement rocher sur lequel reposent les alluvions), ce qui provoque la perte de surfaces de frayères pour les poissons et plus généralement la chute de la biodiversité, en particulier dela faune benthique (macro invertébré),
- la perte des bras secondaires du cours d’eau, des annexes hydrauliques (bras morts, mares, adoux, etc.) et de nombreux habitats favorables pour les espèces aquatiques.
Ces travaux répondent donc à des attentes locales importantes mêlant autant des enjeux humains qu’écologiques. Ce type d’interventions est conduit par d’autres structures gestionnaires de bassin versant dans tout le quart sud-est de la France. Elles offrent le meilleur compromis au regard de l’investissement d’argent public et des résultats attendus sur le terrain, en rapport aux différents enjeux énoncés plus haut.
Ces types d’intervention sont par ailleurs inscrits aux directives du contrat de rivière, dans les documents d’objectifs NATURA 2000 et font l’objet d’un partenariat avec le monde de la recherche (INRAE) pour pouvoir apprécier leur efficience globale.
Évolution des secteurs d’intervention depuis 2015 :
Le petit et le grand Buëch ont été concernés les premiers par ce type d’intervention, car les enjeux humains et écologiques y étaient prioritaires. Depuis 2019, 3 affluents ont bénéficié de ces travaux, la Méouge (partie Drômoise et 05), le torrent de Maraize (2021) –lisez notre article qui revient en détails sur ces travaux – et Chauranne à l’automne 2022 – nous vous avons présenté les travaux programmés ici.
Une autre intervention de ce type a eu lieu en 2022 sur le torrent de Poutelier , commune de Saint-Auban d’Oze, qui vient d’investir dans une nouvelle station d’épuration à cet endroit.
Les travaux mécaniques réalisés à l’automne 2022
Torrent de Poutelier, commune de Saint-Auban d’Oze
Le maire du village avait sollicité le SMIGIBA en 2021 à propos de la construction d’une station d’épuration sur cette commune, qui en était dépourvu jusqu’ici. La parcelle communale accueillant cette infrastructure est située à proximité immédiate du torrent de Poutelier. Les berges du torrent sont globalement stables dans ce secteur, mais un risque hydraulique subsistait lié à la la fermeture du lit par la végétation rivulaire.
Le SMIGIBA a donc proposé au maire d’intervenir sur le secteur pour réouvrir le lit du torrent et ainsi limiter les risques de débordement en cas de crue. Étant donnée la surface à traiter, une intervention avec des moyens mécaniques a été privilégiée (broyeuse, pelle mécanique). 4000 m² de végétation ont été broyés, puis des bandes de 8 m de large de part et d’autre du torrent ont été scarifiées.


Chauranne et affluents
Pendant 1 mois, 3,6 ha de jeune végétation arbustive ont été broyés dans le lit du torrent de Chauranne. C’est l’entreprise Polder, équipée notamment d’une pelle mécanique, qui a procédé au broyage. Ce dernier a concerné 46 secteurs, du pont de la Garenne (commune d’Aspremont) jusqu’au lieu-dit des Abriès (commune de Saint Pierre d’Argençon). Nous vous avions présentés ces travaux dans un précédent article.
Après broyage de la végétation, certains bancs de galets ont scarifiés. Cette opération consiste à labourer les bancs de graviers à 1m de profondeur afin de les ameublir. Ils seront ainsi plus facilement érodés et remis en mouvement lors des prochaines crues.
Enfin, 3 chenaux de redynamisation on été réalisés vers le secteur des « Priourets » à Aspremont, pour permettre au cours d’eau d’évacuer plus facilement les alluvions des bancs scarifiés vers le Buëch. Ces chenaux, qui vont permettre de diviser le cours d’eau en période de crue, ont pour but également de limiter les érosions des berges et des terres agricoles situées de part et d’autre de Chauranne. D’autres chenaux de ce type auraient du être réalisés à l’amont de ce secteur mais l’administration n’a pas souhaité que le SMIGIBA travaille dans ce sens.
Les bonnes conditions métrologiques ont permis de réaliser l’intégralité des travaux sans problèmes particuliers.




La confluence du torrent de Saint-Aubert – Buëch à Ribiers lieu-dit la Tuillière, Val-Buëch Méouge
Depuis l’année 2016, le SMIGIBA est force de proposition dans ce secteur délicat. Cette année, une crue automnale a généré une importante érosion de berge, emportant des volumes très importants de terres sur près de 200m. A la décrue, il est apparu que des déchets provenant d’une ancienne décharge municipale avaient été relargués dans le lit du Buëch. Par endroit, la berge de l’ancienne décharge a été érodée sur plus de 30m de large, emportant intégralement toute la ripisylve; dont des gros peupliers noirs.
Le SMIGIBA est déjà intervenu à 3 reprises sur ce secteur, pour réaliser dans un premier temps des travaux dans le lit du Buëch et soulager la berge en cas de crue (essartement de la végétation, scarification de certains bancs et réalisation de chenaux de redynamisation).
Étant donné qu’aucune solution pérenne n’a pu voir le jour quant au devenir de cette ancienne décharge et que le risque de relargage de déchets était encore important, le SMIGIBA a proposé dans un second temps d’aménager une protection de berge en génie végétal rustique, au droit de l’ancienne décharge et à l’amont. Ces travaux ont été réalisés au printemps 2020.
Dans un 3ème temps, en décembre 2021, le SMIGIBA a procédé à des travaux de bouturage de saules pour favoriser la végétalisation du talus et du pied de berge. Néanmoins, la végétation rivulaire se développant sur cette berge fraîchement reconstituée est encore trop jeune pour assurer le bon ancrage du talus. Le risque de sapement de cette berge lors d’une prochaine crue est encore important.
C’est pourquoi le SMIGIBA a réalisé cet automne un épi sous la forme d’un merlon – fusible au droit de l’ancienne décharge. Cet aménagement constitué uniquement d’alluvions (galets et graviers) n’a pas vocation à être perenne mais uniquement à assurer une protection supplémentaire lors des prochaines crues, en espérant qu’il résiste jusqu’à ce que la végétation soit suffisamment enracinée et puisse prendre le relais.


Travaux d’extraction de déchets dans le Buëch à Aspremont
Au début du mois d’avril, des déchets ont été déversés dans le grand Buëch en aval d’Aspremont par une personne indélicate. En collaboration avec la DDT des Hautes Alpes, ces déchets ont été retirés à l’aide d’un camion grue. Retrouvez le détail de cette intervention sur notre page Actualités.


Travaux en régie
Des petits travaux sont réalisés en régie par le technicien de rivière du SMIGIBA à la demande des communes du bassin versant. Retour sur les interventions principales conduites pendant l’année 2022.
Commune de Séderon, cours d’eau Méouge
En collaboration avec la commune de Séderon, le technicien de rivière du SMIGIBA a procédé à de petits travaux de désembâclement autour d’un pont, avec l’aide d’élus de la commune et de l’agent communal. Les travaux concernent le torrent du Baïs, affluent de la Méouge.




Commune de Serres, cours d’eau « Bel-Air »
À Serres, c’est le ruisseau de Bel-Air qui a eu droit à de petits travaux d’abattage et de désembâclement, réalisés avec l’assistance des agents communaux. Cela a permis de diminuer le risque de débordement du ruisseau en cas de crue.




Futurs travaux
La prochaine campagne d’entretien manuel de la végétation des berges commencera en début d’année 2023. Une douzaine de secteurs du bassin versant du Buëch feront l’objet de travaux. Outre l’information locale habituelle (concertation avec les mairies, éventuellement réunions de présentation à la population), nous publierons sur ce blog une présentation détaillée de ces interventions. Qu’on se le dise, le SMIGIBA ne rechigne pas à mettre les bottes dans les cours d’eau !